COMMISSION DES NORMES COMPTABLES

Avis CNC 2016/4 - Associations et fondations: traitement comptable d’attributions pluriannuelles dans de grandes et de très grandes associations et fondations

Avis du 13 avril 20161  

Introduction

La question soumise à la Commission des normes comptables concerne la situation dans laquelle une association ou une fondation bénéficie d’attributions pluriannuelles octroyées par des personnes physiques ou morales. Les attributions pluriannuelles accordées à des associations ou des fondations peuvent être qualifiées de don, de subside ou de legs, d’une part, ou prendre une autre forme juridique, comme par exemple les versements effectués dans le cadre d’un sponsorship. En contrepartie, l’association ou la fondation bénéficiaire s’engage dans le cadre de son but, envers les bénéficiaires désignés, au financement pluriannuel d’un ou plusieurs projets, à concurrence d’un montant total déterminé.

La Commission a été interrogée au sujet du traitement comptable à réserver en l’espèce.

Traitement comptable dans le chef de l’association ou de la fondation bénéficiaire

En ce qui concerne les dons et les subsides, la Commission a déjà relevé que la différence entre un don  et un subside n’est pas toujours claire, étant donné que, lorsqu’il s’agit d’associations et de fondations, ces notions juridiques peuvent être assez proches.2  Cette différence n’a pas d’importance pour le traitement comptable.

La Commission tient avant tout à souligner que la nature et le traitement comptable des attributions pluriannuelles décrites ci-dessous diffèrent de manière fondamentale de celui des simples promesses d’attributions. En effet, il ressort de l’article 932 C. Civ. qu’une simple promesse de donation ou offre de donation, même passée sous la forme d’un acte notarié, n’est pas une donation: le « donateur » peut y renoncer à tout moment, même tacitement, ces promesses n’ont par conséquent aucun effet en cas de décès ou de survenance d’incapacité dans son chef. Aussi longtemps qu’il n’y a pas eu échange de consentement entre parties, il n’y a pas de donation. Il en résulte que, sous l’angle comptable,  la naissance d’un engagement d’une offre ou d’une promesse de donation ne se traduira pas par la comptabilisation d’un produit dans le chef de l’association ou de la fondation bénéficiaire.

Les dons, legs et subsides reçus seront comptabilisés en moyens permanents, en subsides en capital ou en compte de résultats respectivement selon qu'ils conduisent à augmenter de manière permanente les fonds associatifs, qu'ils visent à constituer un actif immobilisé affecté de manière durable à l'activité de l'association ou qu'ils consistent en une activité courante de l'association.3  

En outre, les subsides, dons et legs peuvent se différencier en fonction de leurs modalités d’exécution. Par exemple, un subside peut en effet être assorti d’un acompte. Son paiement peut également être étalé dans le temps. A ce sujet, la Commission rappelle son avis CNC 2009/3 relatif aux subsides en capital dont l’octroi et/ou le paiement sont échelonnés sur plusieurs années.4  

La Commission est d’avis que, dans les autres cas où des tiers peuvent convenir avec l’association ou la fondation d’un versement  périodique  (« attributions  pluriannuelles », par exemple dans le cadre d’un contrat de sponsorship), la règle suivante est applicable : si  un  tel  accord  est contractuel et inconditionnel, les attributions non payées à la clôture du bilan sont comptabilisées au titre de créance. Le conseil d’administration devra faire preuve de prudence dans l’interprétation  à  donner  au  caractère  liquide et exigible de ces  attributions.

Les produits sont reportés aux exercices ultérieurs, le cas échéant,  via le compte de régularisation 493 Produits à reporter (par exemple, lorsque le contrat stipule explicitement que l’attribution a pour but de soutenir le fonctionnement de l’association ou de la fondation pour un certain nombre d’années). En outre, la Commission souligne que la prise en résultats ne correspond généralement pas  aux modalités de paiement. 

Dans le cas particulier où le donateur ou la personne qui effectue l’attribution  et l’association ou la fondation bénéficiaire ont convenu que l’attribution soit conditionnée par la réalisation annuelle de certains objectifs, la créance ne devient certaine qu’à l’échéance de chaque période et fera l’objet, chaque exercice, d’une écriture correspondante en compte de créances et la comptabilisation d’un produit correspondant.5  

Traitement comptable dans le chef de l’association ou de la fondation (initialement bénéficiaire) accordant l’attribution 

Dans le cas soumis à la Commission, l’association ou la fondation qui était le bénéficiaire initial de l’attribution (pluriannuelle) prend à son tour des engagements financiers envers d’autres associations et fondations. 

Dans ce cas, il revient à l’organe de gestion de l’association ou de la fondation effectuant l’attribution de décider, sur la base des circonstances concrètes et des caractéristiques du contrat, de la naissance de la dette. 

Dans le cas où le paiement n’est exigible qu’en cas de réalisation d'une condition suspensive, il y a lieu de considérer qu'aussi longtemps que cette condition ne se trouve pas réalisée, il n'y a pas lieu d'acter une dette ni une provision au passif en considération de cette éventualité.6  Une mention appropriée dans l'annexe s'imposera en vertu de l'article 25, § 3 de l’AR C.Soc.7  En revanche, lorsque la condition se réalise, il y a lieu d'acter à due concurrence la naissance de la dette correspondante.8  De cette façon, une attribution qui est soumise à la réalisation d’une certaine condition suspensive annuelle sera reprise, annuellement en compte de dettes.

Une dette assortie d’une condition résolutoire, doit être immédiatement comptabilisée.
 

  • 1Le présent avis a été élaboré après la publication pour consultation publique d’un projet d’avis le 19 janvier 2016 sur le site de la CNC.
  • 2Avis CNC 2010/16 - Traitement comptable, dans les comptes annuels des grandes et très grandes associations et fondations bénéficiaires, des subsides, dons et legs octroyés en espèces.
  • 3En particulier, il reviendra à l’organe d’administration de fixer les règles qui permettent de distinguer les différentes formes de subsides dont l’association ou la fondation bénéficie. Dans son appréciation, l’organe d’administration doit tenir compte de l'objet des subsides plutôt que de leur affectation effective. En règle générale, ces deux éléments coïncideront dans la pratique. Pour de plus amples explications et des exemples d’écritures, voir l’avis CNC 2010/16 - Traitement comptable, dans les comptes annuels des grandes et très grandes associations et fondations bénéficiaires, des subsides, dons et legs octroyés en espèces et l’avis CNC 2013/2 – L'emploi du compte 15 Subsides en capital par les grandes et très grandes associations et fondations.
  • 4Avis CNC 2009/3 - Traitement comptable des subsides en capital dont l’octroi et/ou le paiement sont échelonnés sur plusieurs années.
  • 5Pour les attributions qualifiées de subside, voir l’avis CNC 2009/3 - Traitement comptable des subsides en capital dont l'octroi et/ou le payement sont échelonnés sur plusieurs années.
  • 6Voir l’avis CNC 148-6 - Traitement dans les comptes d'opérations assorties d'une condition suspensive.
  • 7Point V.B de l’avis CNC 2011/13 - Subsides des pouvoirs publics ; voir dans le même sens, l’avis CNC 136/1 - Obligations conditionnelles.
  • 8Avis CNC 2011/13 - Subsides des pouvoirs publics (point V.B) ainsi que son addendum : avis CNC 2014/2 - Le traitement comptable d'une aide publique reçue sous forme d'une avance récupérable.