COMMISSION DES NORMES COMPTABLES

Avis CNC 2018/02 - Crédit d’impôt pour frais de recherche et de développement

Avis du 21 mars 20181

Introduction

Par le présent avis, la Commission entend clarifier la façon dont une société doit reprendre le crédit d’impôt pour frais de recherche et de développement dans ses comptes annuels. En ce qui concerne l’inscription à l’actif des frais de recherche et de développement, la Commission fait référence à l’avis CNC 2016/16 - Frais de recherche et de développement : modifications introduites par l'arrêté royal du 18 décembre 2015.

Le crédit d’impôt pour frais de recherche et de développement est régi par les articles 289quater à 289novies et 292bis du Code des impôts sur les revenus 1992 (ci-après CIR 92). Le crédit d’impôt pour des frais de recherche et de développement remplace, si la société le décide, la déduction pour investissement pour des frais de recherche et de développement.

La Commission ne se prononce pas dans le présent avis sur les dispositions fiscales applicables. En ce qui concerne le traitement fiscal, la Commission fait référence à la circulaire fiscale n° Ci.RH.421/579.072 du 10 septembre 2010.

Description succincte des modalités du crédit d’impôt pour recherche et développement

Le crédit d’impôt pour frais de recherche et de développement signifie en substance qu’une société peut imputer dans sa déclaration à l’impôt des sociétés2 un montant sur l’impôt à payer, en fonction des frais de recherche et de développement. Si l’impôt à payer est inférieur au montant imputable, la société peut reporter la quotité non imputable de ce montant à la période imposable suivante. Le solde du crédit d’impôt reporté de l’exercice d’imposition le plus ancien est imputé en premier lieu.3 Si le crédit d’impôt, après imputation de l’impôt de cinq exercices successifs, ne peut pas être entièrement imputé, la quotité non imputable sera remboursée par l’enrôlement de l’impôt relatif à ce cinquième exercice d’imposition.

Afin de pouvoir bénéficier du crédit d’impôt, le contribuable doit opter pour celui-ci à partir d’une période imposable donnée. A cet effet, il est nécessaire d’ajouter le formulaire 275W à la déclaration.

Les sociétés peuvent bénéficier du crédit d’impôt en une fois (crédit d’impôt unique) ou de manière échelonnée (crédit d’impôt étalé) sur la période d’amortissement des immobilisations qui ont fait naître le crédit d’impôt. Si, lors de la cession ou de la mise hors d’usage d’une immobilisation, le total des crédits d'impôt pour recherche et développement déjà imputés [crédit d’impôt étalé] est inférieur au crédit d'impôt pour recherche et développement qui aurait pu être imputé [crédit d’impôt unique], un crédit d'impôt pour recherche et développement complémentaire est accordé à due concurrence.4

Le crédit d’impôt non encore imputé est perdu en cas de fusion ou de scission taxées. De même, le crédit d’impôt non encore imputé est perdu dans le cas où la société subit un changement de contrôle qui ne répond pas à des besoins légitimes de caractère économique ou financier.5

S'il ne peut être imputé pour un exercice imposable déterminé sur l'impôt de cinq exercices d'imposition successifs, une partie du crédit d'impôt pour recherche et développement correspondant à cet exercice d'imposition, cette partie est restituée. A cet effet, il faut cependant remplir la condition requérant  au moins cinq périodes imposables après la naissance du crédit d’impôt.6

Le crédit d’impôt n’est pas stricto sensu une créance certaine. Certaines conditions doivent en effet encore être remplies avant que les pouvoirs publics procèdent au remboursement.

Le crédit d’impôt pour recherche et développement a été introduit pour permettre une présentation plus correcte du prix de revient belge en matière de recherche et développement dans le reporting international des sociétés et de présenter plus clairement et plus visiblement des comparaisons internationales en matière de déductions pour investissement.7 La déduction pour investissement pour des frais de recherche et de développement ne donne jamais lieu à un crédit remboursable. Ainsi, la quotité non imputable d’une telle déduction pour investissement ne peut pas être reprise en tant que créance dans les comptes annuels, mais seulement comme latence fiscale active à mentionner dans l’annexe. Le crédit d’impôt pour des frais de recherche et de développement remplace, si la société le décide, la déduction pour investissement pour des frais de recherche et de développement.

La Commission déduit de la justification précitée relative à l’institution d’un système de crédit d’impôt pour des frais de recherche et de développement que le législateur a l’intention de faire exprimer ce crédit d’impôt en tant qu’élément de l’actif dans les comptes annuels de la société.

Traitement comptable

Le traitement comptable du crédit d’impôt pour des frais de recherche et de développement est illustré à l’aide des exemples chiffrés suivants.

Crédit d’impôt unique pour recherche et développement

Le crédit d’impôt pour l’exercice N s’élève à 6.000 euros. A la fin de l’exercice, il n’est imputable que pour un montant de 2.500 euros.

Écritures au cours de l’exercice N, l’exercice de l'investissement qui donne droit au crédit d’impôt

4128    Impôts et précomptes à récupérer 6.000  
  à 67/77   Impôts sur le résultat/Régularisations d'impôts et reprises de provisions fiscales   6.000
670 Impôts belges sur le résultat de l'exercice 2.500  
  à 412 Impôts et précomptes à récupérer   2.500

Écritures au cours de l’exercice N+1: le crédit d'impôt reporté est imputable pour un montant de 1.500 euros

670 Impôts belges sur le résultat de l’exercice 1.500  
  à 412 Impôts et précomptes à récupérer    1.500

Écritures au cours des exercices N+2 et N+3

Pour les exercices N+2 et N+3, aucun impôt des sociétés n’est dû ; dès lors il n’y a aucune imputation du crédit d’impôt reporté.

Écritures au cours de l'exercice N +4

Pour l’exercice N+4, aucun impôt des sociétés n’est redevable. A la fin de l’exercice N+4, la partie du crédit d'impôt ne pouvant pas être imputée, d’un montant de 2.000 euros, est remboursée9 .

5500 Etablissements de crédit : Comptes courants 2.000  
  à 412 Impôts et précomptes à récupérer   2.000

Crédit d’impôt étalé pour recherche et développement

Une société opte pour un crédit d’impôt étalé en fonction des amortissements fiscalement admis de l’actif pour lequel le crédit d'impôt est obtenu. Le crédit d’impôt concerne un investissement qui est amorti fiscalement sur dix ans avec des annuités fixes. Le montant total du crédit d’impôt étalé s’élève à 7.600 euros (arrondi par souci de simplification). Si la société optait pour un crédit d’impôt unique, celui-ci serait de 5.000 euros.10

Écritures au cours de l'exercice N

Le montant imputable établi pour l’exercice N s’élève à 760 euros. Pour l’exercice N, le crédit d’impôt n’est effectivement imputable que pour 450 euros, à titre d’exemple.

Au moment de l’investissement donnant droit au crédit d’impôt, une créance est déjà comptabilisée pour un montant de 5.000 euros, c'est-à-dire le montant du crédit d’impôt qui serait obtenu pour un crédit d’impôt unique. Ensuite, l’imputation effective pour l’exercice N est comptabilisée pour un montant de 450 euros. La différence entre 760 euros et 450 euros, soit 310 euros, est reportée à l’exercice suivant.

41211 Impôts et précomptes à récupérer 5.000  
  à 67/77 Impôts sur le résultat/Régularisations d'impôts et reprises de provisions fiscales   5.000
670 Impôts belges sur le résultat de l’exercice  450  
  à 412 Impôts et précomptes à récupérer    450

Écritures au cours de l'exercice N+1

Le montant imputable établi pour l’exercice N+1 s’élève à 760 euros. Il y a un crédit d’impôt reporté de l’exercice précédent pour un montant de 310 euros. Le montant du crédit d'impôt imputable au terme de l’exercice N+1 est par exemple de 850 euros. Le solde du crédit d’impôt reporté de l’exercice d’imposition le plus ancien (310 euros de l’exercice N) est imputé en premier lieu. Le montant effectivement imputé12 est donc composé de la quotité non encore imputée de l’exercice N (310 euros) et d’une partie (540 euros, soit 850 euro – 310 euros) du crédit d’impôt, établie pour l’exercice N+1. Le report à l’issue de l’exercice N+2 s’élève donc à 22013 euros.

670 Impôts belges sur le résultat de l’exercice  850  
  à 412 Impôts et précomptes à récupérer    850

Ecritures au cours des exercices N+2, N+3, N+4 et N+5

Aucun impôt n’est dû pour les exercices N+2, N+3, N+4 et N+5 et, dès lors, il n’y a pas d’imputation du crédit d’impôt. A la fin de l’exercice N+5, une restitution du crédit d’impôt relatif à l’exercice N+1 a cependant lieu, qui ne pouvait pas être imputé, à hauteur de 220 euros. Lors de la réception de la restitution, la créance est réduite de 220 euros.

Le montant du crédit d’impôt constitué qui est étalé dépasse le montant du crédit d’impôt unique

Les données sont les mêmes que celles mentionnées dans le sous-titre B ci-dessus, outre le fait qu’une imputation effective de 760 euros a eu lieu durant les exercices N à N+5.

A la fin de l’exercice N+6, un nouveau crédit d’impôt est acquis pour un montant de 320 euros, soit (760 euros × 7) – 5.000 euros.

Pour les exercices N+7, N+8 et N+9, un nouveau crédit d’impôt est acquis pour chacun de ces exercices, à concurrence d’un montant de 760 euros. Pour chacun de ces exercices, une créance est comptabilisée lors de la naissance du crédit d’impôt, à concurrence de 760 euros.

Perte du crédit d’impôt pour recherche et développement

En cas de perte du crédit d’impôt, la perte de la créance à l’égard du gouvernement est comptabilisée immédiatement sur le compte 67  Impôts sur le résultat14 .

 

  • 1Le présent avis a été élaboré après la publication pour consultation publique d’un projet d’avis le 8 janvier 2018 sur le site de la CNC
  • 2Mutatis mutandis dans la déclaration des non-résidents sociétés (INR/soc.).
  • 3Article 292bis, § 1, alinéa 4, CIR 92.
  • 4Article 289sexies, CIR 92.
  • 5Article 292bis, § 2, CIR 92.
  • 6C’est ce qu’il ressort de la formulation de l’article 292bis, § 1, dernier alinéa CIR 92.
  • 7Amendement numéro 11 du Gouvernement, Documents de la Chambre 51 2128/03, page 19.
  • 8Dans la mesure où l’organe de gestion estime que le remboursement ou l’imputation n’aura lieu qu’après plus d’un an, cette créance doit être enregistrée en tant que créance à plus d’un an (compte 291 Autres créances).
  • 9Par l’enrôlement de l’impôt des sociétés.
  • 10En application d’article 289sexies, CIR 92.
  • 11Dans la mesure où l’organe de gestion estime que le remboursement ou l’imputation n’aura lieu qu’après plus d’un an, cette créance doit être enregistrée en tant que créance à plus d’un an (compte 291 Autres créances).
  • 12La Commission réaffirme que le présent avis n’entend pas prendre position sur le traitement fiscal du crédit d’impôt. La composition du montant imputable mentionné dans l’exemple est fondée sur l’exemple chiffré développé par l’administration fiscale au point 8 de la circulaire n° Ci.RH.421/579.072 du 10 septembre 2010.
  • 13Soit 760 – 540.
  • 14Ce coût est de nature exceptionnelle. Dans le cas présent, la Commission estime qu’une comptabilisation en tant que coût fiscal, en fournissant une explication adéquate, constitue l’option la plus appropriée.