Avis CNC 129/1 - Comptabilisation d'actions de bonus
La Commission a été saisie de la question de savoir si, lorsqu'une entreprise se voit attribuer au prorata de sa participation dans une autre société des actions de celle-ci, créées en représentation d'une incorporation de réserves au capital, la valeur de ces «actions de bonus» peut être portée à l'actif en accroissement de la valeur comptable du portefeuille, et leur contrevaleur au compte de résultats au titre de produits financiers.
La réponse négative donnée à cette question par la Commission est fondée sur la doctrine adoptée généralement à l'étranger en cette matière et sur les considérations suivantes.
Deux optiques sont concevables quant à la prise en considération des revenus de participations ou d'actions. La première, traditionnelle dans notre pays et consacrée par l'arrêté royal du 8 octobre 1976, considère comme revenu le transfert d'espèces ou, de manière générale, d'actifs d'une société à son actionnaire. Au moment de l'attribution du dividende il y a diminution du patrimoine de la société qui le met en paiement, corrélative à l'accroissement du patrimoine de l'actionnaire qui le perçoit. Selon cette optique, les actions de bonus ne constituent pas un revenu, vu que leur attribution ne représente et n'entraîne aucun transfert de patrimoine.
La seconde optique consiste à faire abstraction de la personnalité juridique distincte de la société dans laquelle la participation est détenue et à considérer que les résultats réalisés au niveau de celle-ci, le sont simultanément et à concurrence du taux de la participation détenue, par la société qui détient la participation. Cette méthode dite de mise en équivalence (equity method) constitue quant aux participations non majoritaires la règle en matière de comptes consolidés. La quatrième directive de la CEE du 25 juillet 1978 autorise - provisoirement - en son article 59 les Etats membres à permettre l'adoption de cette méthode pour les comptes annuels non consolidés. Il appartiendra au Gouvernement belge de décider en temps voulu s'il accepte la mise en oeuvre de cette méthode dans les comptes non consolidés.
Mais, dans cette seconde optique, les résultats de la société qui détient la participation ne sont en rien influencés par la mise en paiement des dividendes, a fortiori par l'attribution d'actions de bonus. C'est de manière systématique la totalité du résultat, positif ou négatif, de la société en cause qui se retrouve à due concurrence dans les résultats de l'entreprise détenant la participation. En revanche, en cas de prise en résultats d'actions de bonus, il y aura des résultats à ce titre non pas à la mesure de l'accroissement des fonds propres et du résultat de la société en cause, mais à la mesure du seul montant incorporé au capital et seulement pour autant que des titres soient créés en représentation de cette augmentation de capital. Par ailleurs, en ce cas, les résultats négatifs ne se répercutent pas directement sur les résultats de la société détenant les actions.
Il s'ensuit que ni dans l'une ni dans l'autre optique la prise en résultats d'actions de bonus ne peut se prévaloir d'une cohérence logique.
En revanche, rien n'empêche une entreprise qui détient une participation dans une autre société qui procède à l'autofinancement important par mise en réserve de ses bénéfices ou d'une fraction importante de ceux-ci, de procéder - indépendamment de toute attribution d'actions de bonus, mais notamment en cas d'incorporation de réserves au capital - à une réévaluation de la valeur pour laquelle cette participation est portée dans ses comptes. Cette réévaluation ne constituera certes pas dans son chef un résultat susceptible d'être distribué. Mais ce caractère non distribuable correspond à l'affectation de ce résultat au niveau de la société dans laquelle la participation est détenue, au financement durable de celle-ci, principalement si cette affectation durable se trouve traduite par une incorporation au capital.
La création par une société d'actions de bonus en représentation d'une incorporation au capital de réserves ou de bénéfices, et l'attribution de ces titres aux actionnaires dans la proportion de leur participation au capital, ne modifie pas l'intéressement de l'actionnaire mais seulement le nombre d'actions par lequel cet intéressement est représenté.
Il s'ensuit que c'est à tort que l'on considérerait que des titres de bonus résultent d'une attribution «gratuite» et que leur prix d'acquisition serait dès lors égal à zéro. Seule la représentation de l'intéressement étant modifiée, il s'indique de répartir le prix d'acquisition des titres anciens - ainsi que le cas échéant les réductions de valeurs et les plus-values actées - sur le nombre de titres accru à concurrence de la proportion de titres nouveaux créés.
Si les actions anciennes ont été acquises à des prix différents, le prix d'acquisition des titres individuels sera ajusté par groupe de titres ayant le même prix d'acquisition.