Avis CNC 173/1 - Passage à l'euro : aspects de droit comptable 

Introduction

Sur la base des décisions prises aux sommets européens de Madrid, de Florence et de Dublin, des délibérations du Conseil des Ministres (belge) en date du 2 août 1996 ainsi que sur la base du «Legal Framework for the Use of the Euro», arrêté par le Sommet de Dublin en décembre 1996, la situation se présente comme suit.

  1. A dater du 1er janvier 1999, l'euro constitue la monnaie des Etats membres de l'Union européenne qui font partie de l'Union monétaire européenne. 
     
  2. Les monnaies nationales de ces Etats membres constituent à partir de cette date et durant une période transitoire précédant leur disparition, des expressions différentes de l'euro, auquel elles sont liées, comme elles sont liées entre elles, dans un rapport fixe, définitif et invariable qui sera fixé par voie d'autorité avant la fin de l'année 1998. 
     
  3. En tant que monnaie de paiement, l'euro existera, à dater du 1er janvier 1999, sous la forme scripturale et, à dater du 1er janvier 2002, également sous la forme de billets et de pièces. Jusqu'à cette dernière date, tous les paiements pourront être faits soit en euro par voie scripturale, soit en monnaie nationale par voie scripturale ou par remise d'espèces. A dater du 1er juillet 2002 les billets et les pièces en monnaie nationale cesseront d'avoir cours légal et seul l'euro subsistera en tant que monnaie de compte et monnaie de paiement. 
     
  4. A dater du 1er janvier 1999, il n'y aura plus de fluctuation de change entre monnaies nationales des pays membres de l'Union monétaire, ni marché de change entre ces monnaies, ni risque de change. Ces monnaies s'échangeront matériellement entre elles, comme avec l'euro, sans variations de cours, au cours de conversion fixé une fois pour toutes par l'autorité politique, sous réserve de l'application d'une commission éventuelle en cas d'échange de billets. 
     
  5. L'introduction de l'euro ne modifie pas les dispositions contractuelles et ne fait pas obstacle à la liberté contractuelle. 
     
  6. Les Etats membres ne peuvent, durant la période transitoire, ni interdire, ni imposer, ni limiter l'usage de l'euro ou l'usage de la monnaie nationale. Durant cette période, les agents économiques ont le choix, sauf convention entre eux, de faire usage de l'euro ou de la monnaie nationale dans la rédaction de leurs actes comme dans leurs opérations de paiement. Les autorités des Etats participants sont tenues d'admettre que, durant cette même période, les agents économiques traitent avec eux, sous l'angle administratif (documents) et juridique (titres de créance ou de dette), comme pour les règlements financiers (monnaie de paiement), à leur choix en monnaie nationale ou en euro. 

Le présent avis est établi dans la perspective d'une introduction de l'Euro à la date du 1er janvier 1999 et de la participation à cette date de la Belgique à l'Union monétaire européenne. 

Aspects de droit comptable 

Sous l'angle du droit comptable applicable aux entreprises industrielles et commerciales1 , les principes mentionnés ci-dessus impliquent les conséquences suivantes, en ce qui concerne la période s'étendant du 1er janvier 1999 au 31 décembre 2001 (phase II B). 

Ces aspects ont fait l'objet d'une concertation au niveau européen, au sein du Comité de Contact des directives comptables, les 16 juillet, 11 octobre et 12 novembre 1996. 

Quant à l'établissement en euros des comptes annuels et des comptes consolidés 

  1. Les Etats membres sont tenus d'accorder aux entreprises constituées sous l'empire de leur législation la faculté d'établir leurs comptes annuels et leurs comptes consolidés soit en monnaie nationale, soit en euros. 

    En Belgique, les arrêtés des 8 octobre 1976 et du 6 mars 1990 devront être adaptés, en ce qu'actuellement ils prescrivent l'établissement des comptes annuels et des comptes consolidés en francs belges. 
     

  2. Les entreprises sont libres de choisir le moment auquel elles passent à l'euro pour la présentation de leurs états financiers. La cohérence implique toutefois qu'une fois le passage à l'euro opéré, celui-ci soit irréversible. 
     
  3. Les entreprises ont-elles la faculté de ne pas faire coïncider le moment à partir duquel elles établissent leurs comptes consolidés en euros et le moment à partir duquel elles établissent leurs comptes annuels en euros? Le Comité de Contact des directives comptables a formulé, à la majorité, l'avis qu'une telle dissociation ne se recommandait pas. Il y a été fait valoir à l'encontre d'une non-coïncidence des moments de passage à l'euro pour les comptes annuels et les comptes consolidés, le risque de confusion lorsque ces deux jeux de comptes sont édités dans le même document et font l'objet de rapports conjoints. La Commission est, quant à elle, d'avis qu'il peut y avoir des motifs valables à passer rapidement à l'euro pour les comptes consolidés et à ne passer qu'ultérieurement à l'euro pour les comptes annuels. Ceci implique toutefois, afin d'éviter les confusions, que les comptes consolidés et les rapports qui les concernent soient nettement séparés des comptes annuels et des rapports qui les concernent. 
     
  4. L'euro étant introduit au 1er janvier 1999, il en découle que les entreprises ont la faculté de passer à l'euro en ce qui concerne leurs comptes statutaires et leurs comptes consolidés, arrêtés à partir du 1er janvier 1999. 

    La question se pose toutefois de savoir si, pour les comptes arrêtés à une date antérieure au 1er janvier 1999 mais approuvés après cette date, (en particulier pour les comptes au 31 décembre 1998) les entreprises ont déjà la faculté de les établir en euros. 

    Dans une interprétation juridique stricte, la réponse est, semble-t-il négative; en effet, l'euro n'existera pas au 31 décembre 1998: il n'existera qu'à dater du 1er janvier 1999. Il paraît difficile d'établir des comptes dans une monnaie qui légalement n'existe pas.

    A l'examen, cette considération ne paraît toutefois pas dirimante. En effet, sous l'angle économique et financier, l'euro existera déjà de par la fixation définitive des parités. Par ailleurs, il existera juridiquement au moment où les comptes seront établis, contrôlés, approuvés par les organes de l'entreprise, communiqués aux divers destinataires, approuvés par l'assemblée et publiés, et donc, au moment où ils produiront tous et chacun des effets juridiques qui s'y attachent. 

    Sous l'angle de la question posée, il est proposé d'opérer une distinction entre les comptes statutaires et les comptes consolidés. 

    En ce qui concerne les comptes statutaires, il ne paraît pas souhaitable d'admettre une telle anticipation. En effet, à la faculté qui serait donnée aux entreprises d'établir leurs comptes en euros, devrait correspondre une obligation pour diverses administrations publiques (Centrale des Bilans, administrations fiscales, administrations sociales, ...) et pour les autres destinataires des comptes, d'accepter ces comptes libellés en euros. Or, si ces administrations et autres destinataires doivent, en vertu des décisions prises au niveau européen, s'organiser pour être en mesure d'accepter des documents et des états comptables et financiers libellés en euros, arrêtés à une date ou relatifs à une période postérieure à l'introduction officielle de l'euro, à savoir au 1er janvier 1999, ils ne peuvent, pour des raisons administratives évidentes, se voir contraints de devoir accepter des documents et états comptables libellés en euros arrêtés à une date ou relatifs à une période antérieure au 1er janvier 1999.

    En ce qui concerne les comptes consolidés, cet élément n'entre pas - ou guère - en ligne de compte. Il ne semble dès lors pas y avoir d'obstacle à autoriser les entreprises à établir et à publier en euros leurs comptes consolidés arrêtés à dater du 31 décembre 1998. En revanche, comme la date à laquelle les parités seront fixées n'est pas encore connue, il ne paraît pas indiqué, à l'heure actuelle, de permettre une telle anticipation pour les comptes consolidés arrêtés avant le 31 décembre 1998. 
     
  5. Réciproquement, il paraît évident que les entreprises ont la faculté de continuer à faire usage de la monnaie nationale pour l'établissement de leurs comptes, jusqu'aux comptes afférents à l'exercice se terminant au 31 décembre 2001, même si ces comptes sont approuvés et publiés après cette date. Sans entendre aucunement limiter l'autonomie de décision des entreprises en la matière, la Commission estime devoir recommander de ne pas attendre cette échéance ultime pour passer à l'euro. 

Quant à la conversion, lors de l'établissement des premiers comptes libellés en euros, des chiffres relatifs à l'exercice précédent libellés originairement en monnaie nationale) 

Conformément à la quatrième directive, l'arrêté du 8 octobre 1976 prescrit la mention, pour les différentes rubriques du bilan et du compte de résultats et pour certains postes de l'annexe, des chiffres correspondants de l'exercice précédent. Il en est de même de l'arrêté du 6 mars 1990, en ce qui concerne les comptes consolidés. 

La question a été posée de savoir à quel cours les comptes relatifs à l'exercice précédent et libellés en francs belges devaient, pour les besoins de la comparaison, être convertis en euros lors du premier établissement de comptes en euros. 

Il y a lieu de noter tout d'abord, que la question n'a de sens que dans le cas où les premiers comptes annuels en euros sont établis à fin 1999 (ou, en ce qui concerne les comptes consolidés, au 31 décembre 1998, dans l'hypothèse dont question ci dessus sub A.4., dernier alinéa). Il est évident, en effet, que si les premiers comptes établis en euros le sont à une date se situant deux ans après l'introduction de l'euro, le problème de la comparabilité et du taux de conversion ne se pose pas. Il s'agira, sans contestation possible, du cours de conversion tel qu'il résultera des décisions prises en 1998 par les autorités politiques européennes. 

De cette constatation, se déduit toutefois la conclusion que c'est bien ce taux officiel de conversion qui doit être adopté dans le cas où les premiers comptes annuels établis en euros, le sont à fin 1999 (ou à fin 1998, dans le cas visé ci-dessus). Il serait, en effet, difficilement concevable, que le passage de la monnaie nationale à l'euro se fasse selon des principes différents et produisent des effets différents, selon le moment où il se produit. 

Plus fondamentalement, l'adoption du cours officiel de conversion pour la «conversion» des chiffres de l'exercice précédent, se justifie par le fait qu'à dater du 1er janvier 1999, l'euro se substitue à la monnaie nationale au cours fixé. C'est, dès lors, à ce cours que les chiffres de l'année précédente doivent être convertis. C'est d'ailleurs, le seul moyen qui écarte la survenance de différences de change. En effet, si l'on convertissait les monnaies nationales au cours, à la date de clôture précédente, de l'écu, il en résulterait des différences de change dans la mesure où, exprimé en monnaie nationale, le cours de l'euro s'écarterait du cours, à l'époque, de l'écu. Ce serait introduire, dans les comptes, des éléments qui leur sont totalement étrangers. A ce titre, on retiendra que la conversion des chiffres en euros devra intervenir même dans le cas où tous les éléments du patrimoine et des résultats de l'exercice antérieur sont, à la base, libellés en monnaie nationale. Si, dans un tel contexte, on introduisait un cours de conversion différent, l'opération ne serait pas neutre. Le même raisonnement s'applique pour les avoirs et engagements en devises; ceux-ci ont, dans les comptes des exercices antérieurs, été convertis en monnaie nationale. 

En conclusion, il y a lieu de considérer que, quel que soit le moment auquel les premiers comptes annuels sont établis en euros, il convient de convertir les montants en monnaie nationale figurant dans les comptes de l'exercice antérieur (par simple application d'un facteur multiplicateur) au cours de conversion défini par les autorités européennes. 

Quant à la tenue de la comptabilité 

Aux termes de l'article 7 de la loi comptable (du 17 juillet 1975) et de l'article 5 de l'arrêté royal du 8 octobre 1976, le bilan et le compte de résultats se rattachent tout directement à la comptabilité et aux états comptables (balances) qui synthétisent les écritures comptables. Il en a toujours été déduit que l'établissement (obligatoire) des comptes annuels en francs belges impliquait que la comptabilité soit tenue dans la même monnaie. 

Le même raisonnement doit-il être tenu en ce qui concerne l'euro ? La réponse paraît devoir être négative. En effet, à dater du 1er janvier 1999, l'euro et la monnaie nationale ne constitueront plus des monnaies distinctes mais des expressions différentes, dans un rapport arithmétique fixe, d'une seule monnaie : l'euro. 

Il y a lieu de tenir compte également du fait que, durant cette période, les entreprises travailleront vraisemblablement simultanément en monnaie nationale et en euros, selon la nature des opérations et selon leur contrepartie. Si, en nombre, la plus grande partie de leurs opérations sont libellées en monnaie nationale, il peut être rationnel, pour réduire le nombre des «conversions» de tenir la comptabilité en monnaie nationale. Mais simultanément, ces entreprises peuvent avoir intérêt à établir leurs comptes annuels en euros. Les comptes annuels sont en effet, davantage que la tenue de la comptabilité, axés sur les utilisateurs externes. 

Comme des comptes annuels libellés en euros sont, sous réserve de l'application du facteur multiplicateur, strictement identiques à des comptes en monnaie nationale2 , il y a lieu de considérer que les entreprises ont la faculté de continuer transitoirement à tenir leur comptabilité en monnaie nationale et, en fin de course, de convertir en euros les chiffres de la balance définitive des comptes dont le bilan et le compte de résultats et les données comptables de l'annexe, présentés en euros, procéderont directement, sans addition ni omission. 

Par identité de motifs, il ne semble pas y avoir d'objection à ce que les entreprises dont l'essentiel des ventes se réalise au comptant par paiements en espèces, continuent à tenir leur comptabilité en francs belges aussi longtemps que l'essentiel de leurs ventes leur sont payées en instruments monétaires libellés en francs belges, et ce jusqu'au 30 juin 2002, au plus tard. 

Quant aux différences de change résultant de la différence entre les cours de change appliqués lors des opérations conclues avant le 1er janvier 1999 dans la monnaie d'un des autres pays faisant partie de l'Union monétaire, et le cours de conversion en euro de cette monnaie 

Remarque préalable 

Il y a lieu de relever au préalable que des différences de change ne peuvent, du moins en ce qui concerne les comptes statutaires, résulter que de l'existence de postes monétaires libellés en une autre monnaie que la monnaie de référence de l'entreprise en cause. Aucune différence de change ne peut résulter de la conversion en euros de postes monétaires libellés au départ en francs belges. Aucune différence de change ne peut, du moins en ce qui concerne les comptes statutaires, résulter des postes non monétaires. 

Quant aux comptes consolidés, ce peut ne pas être le cas en ce qui concerne la transposition dans les comptes consolidés des états financiers des filiales étrangères (à tout le moins dans le cadre de la mise en oeuvre de la méthode dite du taux de clôture). 

Par postes monétaires on entend, pour rappel, la trésorerie ainsi que les postes portant sur un nombre déterminé d'unités monétaires à encaisser ou à payer, que ces postes figurent au bilan ou sous les comptes de droits et d'engagements. 

Position du problème 

Il est certain que le cours de conversion en monnaie nationale des opérations effectuées par une entreprise avant le 1er janvier 1999, libellées dans la monnaie nationale d'un des autres pays membres de l'Union monétaire, ne correspondra pas au cours de conversion relatif qui, pour ces différentes monnaies, résultera des décisions prises par les autorités européennes. 

Exemple : une entreprise de droit belge détient, au 31 décembre 1998, une créance de 100.000 DEM reprise dans ses comptes tenus en francs belges au taux, à l'époque de l'opération, de 1 DEM/20,60 BEF. 
Si l'on suppose que le taux de conversion en euro du DEM et du BEF a été fixé respectivement à 1,88 et à 38,5 le cours de conversion DEM/BEF correspondant sera dès lors de 20,4787. 

Que la comptabilité de l'entreprise belge soit tenue en francs belges ou en euros, il en résultera (sauf opération de couverture ou convention entre parties quant au taux de change) une perte (exprimée en BEF) de 2.060.000 (100.000 x 20,60) - 2.047.870 (100.000 x 20,4787) = BEF 12.130 ou, exprimée en euros, de 315,06 euros. 

Cette différence (en l'occurrence une perte) est, en raison du caractère définitif et irréversible du taux de conversion, elle-même définitive, à la date d'entrée en vigueur de l'euro. En tout état de cause, en effet (et sauf opération de couverture ou convention entre parties quant au taux de change), l'entreprise ne percevra que l'équivalent en BEF de 2.047.870 francs, alors que sa créance est comptabilisée pour un montant de 2.060.000 francs.

Le même raisonnement s'applique si la différence est positive.
 
Ces différences de change peuvent-elles être importantes ? 

Pour toutes les créances et dettes qui viendront à naître dorénavant, (a fortiori pour celles qui viendront à naître au cours des mois précédant l'instauration de l'euro), il est vraisemblable que ces différences de change seront peu importantes, voire négligeables. Il est hautement probable, en effet que, dès avant l'entrée en vigueur du pacte de stabilité, la convergence des politiques économiques entre pays adhérents à l'Union monétaire et l'action des banques centrales de ces pays, comme celle de l'Institut monétaire européen, favoriseront au maximum la stabilité des cours de change entre les monnaies concernées. 

Il n'est toutefois pas exclu que pour les postes monétaires à long terme contractés longtemps avant l'introduction de l'Euro et qui auraient été maintenus à leur valeur d'acquisition, cet écart soit plus important. Ce pourrait être notamment le cas pour des emprunts contractés dans la monnaie d'un pays étranger devenant membre de l'Union monétaire, pour financer des investissements dans ce pays. Ce pourrait être également le cas pour des emprunts et placements à long terme en titres à revenu fixe combinant un différentiel d'intérêt et un risque de change. Il sera traité de ces cas aux points 3, d. et e. ci-après.

Traitement dans les comptes 

Plusieurs questions se posent à propos de ces différences et de leur traitement dans les comptes annuels.

Quelle date ces différences doivent-elles être actées ? 

Doivent-elles être actées au 1er janvier 1999 ou au 31 décembre 1998 ? 

Après un examen approfondi de la question, le Comité de Contact européen est arrivé à la conclusion que le cours de change, approuvé par les autorités européennes au plus tard le 31 décembre 1998, devait être considéré comme le «cours de clôture» au 31 décembre 1998, et que c'est dès lors par référence à ce cours que l'évaluation des postes monétaires devait être opérée dans les comptes à fin 1998 (ou dans les comptes de l'exercice en cours à fin 1998), indépendamment de l'exercice à dater duquel les comptes seraient établis en euros. 

Ces différences constituent-elles un résultat ou sont-elles à imputer directement aux capitaux propres ? 

A l'appui d'une imputation directe aux capitaux propres ont été évoqués le caractère exceptionnel de l'instauration de l'euro, ainsi que la considération qu'il ne s'agirait pas d'une opération de l'entreprise mais d'une modification par voie d'autorité de l'instrument de mesure monétaire. 

En accord avec les conclusions du Comité de Contact, la Commission est d'avis que c'est l'inscription au compte de résultats qui doit être retenue, et ce pour les motifs suivants. 

Tout d'abord, cette solution est la seule qui soit cohérente avec les principes consacrés par l'arrêté royal du 8 octobre 1976 comme par la 4ème directive. Tous les résultats doivent, en effet, (à la seule exception des différences de change résultant de l'application de la méthode du taux de clôture pour l'intégration dans les comptes consolidés, des filiales étrangères) être actés au compte de résultats. Ni le droit européen, ni la réglementation belge ne permettent de porter des charges ou produits directement aux capitaux propres. 
Par ailleurs, du fait que le cours de l'euro sera fixé au niveau du cours de l'écu à une date ou durant une période déterminée, il est évident que l'on ne peut considérer qu'il y a modification de l'instrument de mesure plutôt que résultat de change. 

A quel moment et selon quelles modalités ces différences de change doivent-elles être actées en résultat ? 

La réponse à cette question implique la détermination du moment auquel ce résultat est censé être «réalisé». 
Dans une première approche, l'introduction de l'euro aurait pour effet de figer un écart de conversion au niveau où il se situait au 31 décembre 1998. Cet écart de conversion ne se distinguerait, toutefois, en rien des écarts de conversion (non réalisés) afférents aux postes monétaires libellés en devises étrangères, en général. Dans cette approche il y aurait lieu d'appliquer les règles prévues en matière de conversion des devises, notamment les règles préconisées par la Commission dans son avis relatif aux opérations en devises (avis n° 152/1, bulletin n° 20 de décembre 1987). 

Une seconde approche se fonde sur le caractère définitif et irréversible du rapport d'échange entre les monnaies nationales des pays participant à l'Union monétaire et l'euro, ainsi que sur la disparition de tout risque de change entre ces monnaies à dater du 1er janvier 1999. A partir de cette date, en effet, le résultat de change est définitif et irrévocable. Ce résultat doit dès lors être considéré comme réalisé, en tant que résultat de change et ce même si le poste monétaire auquel il est afférent n'est lui-même pas encore réalisé. Dans cette approche, toutes les différences, aussi bien les différences positives que les différences négatives existant (sous réserve de ce qui sera dit ci-dessous aux points d. et e.) sur l'ensemble des postes monétaires libellés à la date du 31 décembre 1998 en une monnaie nationale d'un pays devenant membre à cette date de l'Union monétaire, seraient prises en résultat à cette date. 

A l'appui de cette seconde approche on retiendra, tout d'abord, le principe déposé dans l'arrêté royal du 8 octobre 1976, comme d'ailleurs dans la 4ème directive, qu'«il doit être tenu compte des charges et produits afférents à l'exercice ou à des exercices antérieurs, sans considération de la date de paiement ou d'encaissement de ces charges et produits ...». 

Par ailleurs, il y a lieu de relever que le cours de conversion des monnaies nationales en euro ne sera pas fixé de manière arbitraire mais sera fixé en fonction du niveau atteint par les différentes monnaies nationales entre elles par rapport à leur cours vis-à-vis de l'écu à une date ou durant une période déterminée. A défaut, il en résulterait de graves perturbations dans les marchés et, le cas échéant, des distorsions des conditions de concurrence entre les entreprises des Etats en cause. 

Il en résulte que ce n'est pas le passage à l'euro en tant que tel qui créera des différences de change. Il aura pour seul effet de figer définitivement les écarts de conversion afférents aux créances et aux dettes existant au 31 décembre 1998, résultant de la différence entre le cours de conversion comptable historique et les cours de l'écu dégagés par le marché et figés dans la définition des cours de conversion de l'euro par rapport aux diverses monnaies nationales. On en déduit que ce n'est pas le passage à l'euro qui fait naître ces différences de change mais bien l'évolution des marchés antérieure à l'introduction de l'euro. 

Enfin, s'agissant de résultats de change réalisés, la disparité de traitement des produits et des charges non réalisés, ne trouve pas à s'appliquer en l'occurrence. 

Les éléments qui sous-tendent cette seconde approche ainsi que sa clarté conduisent la Commission à en préconiser l'adoption. 

Les considérations qui précèdent conduisent à ne pas préconiser, sous réserve de ce qui sera dit aux points d. et e. ci-dessous, l'adoption d'une technique consistant à différer la prise en résultats du solde des écarts positifs, en les portant en comptes de régularisation et à les prendre en profits soit au moment où les postes monétaires auxquels les écarts bruts de conversion sont afférents seraient eux-mêmes réalisés par voie d'arrivée à échéance ou par cession, soit par une technique de répartition forfaitaire sur un certain nombre d'années. 

Emprunts en devises contractés pour financer des actifs non monétaires dont la valeur est fonction du cours de cette devise 

Une question complémentaire porte sur la situation spécifique où des actifs non monétaires (immobilisations corporelles, incorporelles ou financières) situés dans un pays européen devenant membre de l'Union monétaire ou rattachés à ce pays ont été financés par des emprunts contractés dans la monnaie de ce pays. 
L'avis n° 152/1 susvisé de la Commission traite explicitement, en sa section VIII B, des situations de ce type dans les termes suivants :

« En une telle occurrence, la question se pose de savoir s'il s'impose de prendre en charge intégralement et immédiatement les pertes latentes résultant de l'augmentation du cours de la devise de l'emprunt par rapport au franc belge, tout en maintenant les actifs correspondants à leur valeur d'acquisition en francs belges alors que, sur la base de ce même cours majoré, les flux de produits qui seront générés par ces avoirs seront, une fois convertis en francs belges, augmentés à due concurrence. 

Pour autant que - exprimés dans la devise en cause - les flux de produits qui seront générés par un actif soient suffisamment certains, le principe de rattachement des charges aux produits auxquels elles sont afférentes (matching principle), peut justifier que la prise en charge des écarts de conversion négatifs sur l'endettement soit rattachée à la période durant laquelle les produits ou revenus provenant de ces actifs seront actés en résultats (...) ». 

Une entreprise qui aurait appliqué cette approche pourrait, au moment de l'introduction de l'euro, se trouver confrontée à une différence de change pouvant être significative dans la mesure où le produit de la conversion, au cours majoré de la monnaie en cause, du flux des produits ou revenus en devises provenant de ces actifs aurait été inférieur aux écarts de conversion négatifs sur l'endettement. 

On relèvera que, dans ce cas aussi, la différence de change (positive ou négative) relative à l'endettement n'a pas sa source dans l'introduction de l'euro mais dans l'évolution, antérieure à son introduction, du cours de la monnaie de l'emprunt. Le passage à l'euro ne changera dès lors pas, quant au fond, la situation. La modification intervient en matière d'évaluations. Dans la situation actuelle, le problème se situe au plan du mode d'évaluation d'une devise étrangère. Après le passage à l'euro, il n'est plus question d'évaluation du cours de conversion d'une dette en monnaie étrangère étant donné que la dette sera libellée en euro, monnaie de compte de l'entreprise qui établit ses comptes. 

Il en résulte que le principe de correspondance des produits et des charges («Matching principle») qui fondait l'avis susvisé de la Commission, ne trouve plus désormais application sous l'angle des écarts de change. Dans une perspective de continuité des politiques de gestion suivies, l'application de ce même principe de correspondance des charges et des produits peut toutefois, en l'occurrence, justifier une imputation de l'écart de change constaté lors du passage à l'euro, à la valeur de l'élément d'actif financé par l'emprunt en cause. 

Emprunts, créances et placements à long terme en une monnaie étrangère combinant un différentiel d'intérêt par rapport aux passifs et actifs correspondants en francs belges et un risque de change 

Dans son avis précité, relatif aux «Opérations, avoirs et engagements en devises», la Commission a examiné le cas où une entreprise avait emprunté en une devise «forte» à un taux inférieur au taux des emprunts correspondants en francs belges, en assumant le risque d'appréciation de la monnaie de l'emprunt (emprunt non couvert)3

Dans cet avis, la Commission s'exprimait comme suit : 

«Dans ce cas, il se justifie de tenir compte des deux aspects qui ont été à la base de la conclusion de l'opération et, dès lors de provisionner le risque d'appréciation de la monnaie de l'emprunt, au delà de la partie de ce risque qui se serait déjà matérialisée dans le cours de clôture. (...) 

Quant à la politique à suivre en matière de constitution de provisions, il peut se justifier, dans la logique de la décision de gestion de l'entreprise, de mettre en regard, en termes de compte de résultats, l'économie annuelle de charge d'intérêts par rapport à un emprunt en francs belges ne donnant pas lieu à risque de change, et la provision à constituer pour rencontrer le risque de perte de change sur cet emprunt. Il s'avérera certes a posteriori, que le différentiel d'intérêts au moment de la conclusion de l'emprunt ne constituait pas une mesure correcte du risque d'appréciation de la monnaie de l'emprunt tout au long de la durée de celle-ci. Mais, il a pour avantage d'offrir une base objective à la constitution de la provision, se situant tout directement dans la ligne de la décision de gestion adoptée par l'entreprise.» 

Une même combinaison de différentiel d'intérêt et de risque de change peut exister en cas d'emprunt libellé en une monnaie faible, assortie d'un taux élevé lorsque l'entreprise s'attend à une dépréciation importante du cours de la monnaie en cause, ainsi que réciproquement pour les emprunts et placements en monnaies «fortes». 

Si le pays dans la monnaie dans laquelle l'emprunt a été contracté ou le placement a été effectué, rejoint l'Union monétaire, les emprunts et placements deviennent des emprunts et placements en euros, sans risque ultérieur d'appréciation ou de dépréciation, mais restent assortis du taux d'intérêt originaire qui tenait compte de ce risque d'appréciation ou de dépréciation de la monnaie en cause. 

Dans une telle occurrence, il peut se justifier - dans le prolongement de l'avis précité - que la différence de change dégagée lors de l'introduction de l'euro, soit différée à concurrence de la valeur du différentiel d'intérêt - calculé à la date de conclusion de l'emprunt - afférent à la période restant à courir, pour être prise en résultats prorata temporis, au cours de cette période, comme correctif de l'impact sur le compte de résultats, des intérêts courus. 

Actifs non monétaires relevant de sièges d'exploitation situés dans un autre pays de l'Union monétaire 

Dans son avis 172/1 relatif à la comptabilisation de l'activité des succursales étrangères4 , la Commission a opté pour l'enregistrement des flux relatifs aux opérations plutôt que des soldes en fin de période, la comptabilité étant appelée à enregistrer avant tout des opérations et des mutations et non des soldes résultant d'un ensemble d'opérations. 

Il ressort de la logique de cet avis, que le solde des comptes non monétaires n'est pas affecté par les fluctuations de la devise de la succursale dans la mesure où il n'est pas couvert par des emprunts appropriés. 
Dans ce cadre d'action, le passage à l'euro ne génère aucune prise en compte de résultats de gains ou de pertes de change. 

Les comptes non monétaires du siège restent évalués à leur valeur historique et l'écart entre cette valeur historique et la valeur basée sur le cours de fin d'exercice lors du passage à l'euro sera, au niveau de la comptabilité du siège, comptabilisé en compte de résultats au rythme des amortissements des immobilisations concernées, et au fur et à mesure des prélèvements sur stocks existant à la date de ce passage à l'euro. 

Opérations de change à terme entre monnaies des pays membres de l'union monétaire 

Du fait de la substitution, au 1er janvier 1999, de l'euro aux monnaies nationales, les opérations de change entre monnaies de pays membres deviennent des opérations d'échange euro contre euro. 

Ainsi, si une entreprise a conclu le 1er avril 1998 une opération de change à terme DEM contre BEF échéant le 31 mars 1999, comportant l'achat de 100.000 DEM contre 
2.060.000 BEF, l'introduction de l'euro, aux taux de conversion retenus à titre d'exemple (repris au point D.2 du présent avis), aura pour effet que l'entreprise aura à recevoir, le 31 mars 1999, 53 191,49 euros (100 000 : 1,88) et à livrer 53 506,49 euros (2 060 000 : 38,5).  Pour ces opérations de change à terme, deux questions se posent :

  • Sous l'angle civil, ce contrat subsiste-t-il, en tant qu'il porte sur le principal ? A-t¬il encore un objet ? 
    Compte tenu de l'approche générale du «Legal Framework for the use of the euro» adoptée par le sommet de Dublin aux termes de laquelle l'introduction de l'Euro ne modifie pas les relations contractuelles, la Commission est portée à considérer que, sous l'angle du droit civil, le droit et l'engagement subsistent jusqu'à l'échéance et qu'ils doivent, dès lors, être maintenus dans les comptes. A l'échéance, ils s'éteindront normalement par compensation, à concurrence du plus petit des deux montants en cause. 
  • Quant au résultat, divers cas peuvent être distingués : 
    S'il s'agissait d'une opération de couverture d'un autre poste monétaire (figurant au bilan ou constituant un droit ou un engagement hors bilan), l'opération à terme perd, du fait de l'introduction de l'euro, sa caractéristique d'opération de couverture, étant donné qu'elle n'a plus pour effet de réduire (de supprimer) le risque de change. La différence de change sur le contrat à terme devra être prise en résultat en même temps que le résultat de change sur le poste monétaire couvert, et dès lors en principe, comme dit ci-dessus, au 31 décembre 1998. 
    S'il s'agissait d'une opération donnant lieu à une position ouverte, la disparition du risque de change a pour effet que la différence de change sur le contrat à terme représente un résultat réalisé, à prendre en produits ou en charges au 31 décembre 1998. 
    La question a également été posée de savoir si la quotité non courue de la composante «intérêt» constituant le report/déport devait être prise en résultat immédiatement ou être échelonnée pro rata temporis sur la durée résiduelle du contrat de change à terme. 
    Dans la mesure où le report/déport correspond à un différentiel d'intérêt sur des instruments financiers libellés dans des monnaies différentes, la différence de change au 31 décembre 1998 perd son caractère de report/déport, vu qu'il n'y a plus deux monnaies différentes, auxquelles sont attachés des intérêts différents. La justification d'une prise en résultats échelonnée perd, dès lors, sa raison d'être et sa justification. 

Autres instruments financiers (options, ...) portant sur des monnaies des pays membres de l'Union monétaire 

Les principes susvisés s'appliquent aux autres instruments financiers portant sur des monnaies des pays membres de l'Union monétaire. La multiplicité de ces instruments ne permet pas de les examiner individuellement. 

Postes monétaires libellés en écus 

Lors de l'instauration de l'euro, l'écu disparaîtra. Sauf si les parties en ont convenu autrement, l'euro se substituera à l'écu dans les relations contractuelles, dans la proportion de un pour un. Si le cours auquel les avoirs et engagements en écus sont convertis dans la comptabilité de l'entreprise, diffère du cours de conversion de la monnaie nationale en euro, il en résultera une différence de change définitive, de même nature que celle résultant de la détermination des cours relatifs des différentes monnaies des Etats membres de l'Union économique et monétaire. Elle devra être traitée de la même manière. 

Ecarts de conversion afférents aux postes monétaires libellés dans la monnaie d'un pays non membre de l'Union monétaire 

En ce qui concerne les avoirs et engagements en ces devises, deux facteurs interviendront lors de l'introduction de l'euro :

  • d'une part, l'évolution des cours de change de ces monnaies par rapport à la monnaie nationale avant l'instauration de l'euro, 
  • d'autre part la détermination du cours de conversion de l'euro vis-à-vis de la monnaie nationale. 

Du fait que le second facteur ne donne pas lieu à la naissance d'une différence de change, seul le premier dégagera, au moment de l'introduction de l'euro, un résultat. Ultérieurement, ces monnaies continueront à évoluer par rapport à l'euro. 

Les principes qui s'appliquent actuellement au traitement comptable des opérations en devises, aux écarts de conversion et aux différences de change continuent à s'appliquer lors de l'introduction de l'euro et ultérieurement. 

Traitement dans les comptes des coûts liés au passage à l'euro 

Pour nombre d'entreprises, la substitution de l'euro à la monnaie nationale et le passage de l'une à l'autre occasionneront des coûts importants. Ces coûts concernent les infrastructures organisationnelles et informatiques, le remplacement, l'adaptation ou l'obsolescence de machines, d'équipements et de logiciels, l'information du public, la formation du personnel, ... Par ailleurs, dans nombre de cas, le passage à l'euro impliquera une préparation de longue durée, excédant celle qui séparera la décision relative à l'admission des Etats membres à l'Union monétaire de la date du 1er janvier 1999. Ces entreprises ne pourront, dès lors, attendre, avant d'engager les coûts relatifs à ce passage, qu'une décision formelle ait été prise au sujet de l'admission des Etats membres. A défaut, elles pourraient se trouver dans l'impossibilité de répondre aux nouveaux modes de fonctionnement qui résulteront du passage à l'euro et en subir, dès lors, des dommages importants. 

La question a été posée de savoir comment ces dépenses devaient être prises en charge. De manière plus spécifique, il convient d'examiner dans quelle mesure, à quelles conditions et selon quelles modalités ces dépenses peuvent être portées à l'actif et être amorties sur une période déterminée ou faire l'objet d'une prise en charge anticipée par la voie de la constitution de provisions. 

Après une large discussion, le Comité de Contact des directives comptables est arrivé à la conclusion qu'il n'y avait pas lieu de prévoir, pour les coûts liés au passage à l'euro, des règles différentes de celles qui s'appliquent de manière générale, et notamment lors d'innovations techniques ou de modifications technologiques importantes. Cette ligne de conduite s'impose d'autant plus que dans de nombreux cas, il sera difficile, principalement en matière d'infrastructure informatique, de logiciels et d'équipements, de faire nettement le départ entre les dépenses liées exclusivement à l'introduction de l'euro et les dépenses liées à l'adaptation de ces équipements aux progrès technologiques et aux besoins courants de l'entreprise. 
Les principes de droit commun applicables en ce domaine peuvent être résumés comme suit. 

1. Les dépenses effectuées au cours d'une année représentent une charge de cette période, sauf dans la mesure où : 

  • elles se rattachent à une période comptable ultérieure (par le jeu des comptes de régularisation), ou 
  • elles concernent des investissements productifs. 

En ce qui concerne les investissements productifs, leur valeur d'acquisition est prise en charge par voie d'amortissements échelonnés sur la durée d'utilité ou d'utilisation économique probable de l'investissement en cause (article 28, § 2, alinéa 1er de l'arrêté royal du 8 octobre 1976).
Il appartient à l'entreprise de juger, sous sa responsabilité, dans quelle mesure les dépenses en cause constituent un investissement productif c.à.d. sont susceptibles de générer des avantages futurs identifiables.

2. Lorsque, en raison de leur altération ou de modifications des circonstances économiques ou technologiques, la valeur comptable des immobilisations amortissables dépasse leur valeur d'utilisation par l'entreprise, elles font l'objet d'amortissements complémentaires ou exceptionnels (article 28, § 2, alinéa 2 de l'arrêté royal du 8 octobre 1976).
Ces amortissements complémentaires ou exceptionnels prennent, en principe, la forme d'une accélération du plan d'amortissement antérieur, en fonction du raccourcissement de la période d'utilité ou d'utilisation économique future probable de l'actif en cause. Cette révision du plan d'amortissement doit être appliquée à dater du moment où est constaté le raccourcissement de la durée d'utilité ou d'utilisation économique future probable de l'actif considéré. 

3. En ce qui concerne la constitution de provisions pour rencontrer des charges futures (autres que celles visées sub 1 et 2 ci-dessus).
Aux termes de l'article 19, alinéa 4 de l'arrêté du 8 octobre 1976, il doit être tenu compte des charges et produits afférents à l'exercice ou à des exercices antérieurs sans considération de la date de paiement ou d'encaissement de ces charges et produits (...). 

Il s'ensuit : 

  • d'une part, que l'ensemble des produits et des charges afférents à l'exercice ou à des exercices antérieurs (au cas où ces derniers n'auraient pas été pris en compte de résultats d'exercices antérieurs), doit être pris au compte de résultats (respectivement en produits et en charges) de l'exercice;
  • mais, d'autre part, que des produits et des charges afférents à des exercices ultérieurs ne peuvent être imputés à l'exercice; et qu'ils devront par conséquent être rattachés aux exercices qu'ils concernent. 

C'est par application de ce même principe de rattachement que l'alinéa 3 du même article 19 précise qu'il doit être tenu compte de tous les risques prévisibles, des pertes éventuelles et des dépréciations qui ont pris naissance au cours de l'exercice ou au cours d'exercices antérieurs.

Les provisions pour risques et charges ont, aux termes de l'article 13 du même arrêté, pour objet de couvrir des pertes ou charges nettement circonscrites quant à leur nature, mais qui, à la date de clôture de l'exercice, sont ou probables ou certaines, mais indéterminées quant à leur montant.

Il s'ensuit que, si de manière générale, un produit ou une charge sont à rattacher à la période durant laquelle la créance ou la dette correspondante est née dans le chef de l'entreprise, les charges qui viendront à naître ultérieurement doivent être imputées à un exercice antérieur par la voie de la constitution de provisions dans la mesure où : 

a) elles sont à rattacher à cet exercice antérieur, c.à.d. : 

  • d'une part, qu'elles trouvent leur cause dans une circonstance survenue au cours de cet exercice et,
  • d'autre part, qu'elles n'auront pas pour contrepartie des avantages à percevoir au cours d'exercices ultérieurs; 

b) le montant à provisionner est quantifiable d'une manière raisonnable et justifiée. 

L'arrêté précise également que les provisions doivent être constituées systématiquement sur la base des méthodes arrêtées par l'entreprise conformément à l'article 15 et que cette constitution de provisions ne peut dépendre du résultat de l'exercice. 

Les méthodes gouvernant la constitution des provisions et la répartition de leur constitution dans le temps doivent être étroitement adaptées à la nature des risques qu'elles visent à rencontrer ainsi qu'aux éléments qui leur donnent naissance ou qui en déterminent le montant. A défaut de critères justifiant une prise en charge sur une base systématique différente, il s'indique d'adopter une répartition dans le temps sur une base linéaire. Tel paraît être le cas pour les charges susvisées liées au passage à l'Euro. 
Si l'on tient compte : 

  • de la prise en charge conformément aux points 1 et 2 ci-dessus par voie d'amortissements des investissements productifs nouveaux et par voie d'une accélération du plan initial d'amortissement des immobilisations qui à la suite de l'introduction de l'euro deviendront obsolètes, d'une part, 
  • des charges qui sont à considérer comme afférentes à la période durant laquelle elles seront exposées, d'autre part, il est vraisemblable que, sauf dans des secteurs déterminés, les charges à provisionner en application des principes susvisés seront de nature subsidiaire. 

On relèvera aussi que les frais liés au passage à l'euro ne peuvent être portés au bilan au titre de frais de restructuration au sens de l'article 24 alinéa 2 de l'arrêté royal du 8 octobre 1976. 

Il n'appartient pas à la Commission de se prononcer sur l'application de ces principes dans la multiplicité et la grande variété des cas qui peuvent se présenter. Cette application relève de la responsabilité de l'organe de gestion, agissant en conformité avec les principes généraux de prudence, de sincérité et de bonne foi, ainsi que du reviseur dans les cas où un reviseur a été désigné pour le contrôle des comptes. 

Sur un point important, la Commission estime pouvoir se prononcer : les frais afférents au passage à l'euro peuvent-ils être provisionnés à charge d'exercices se clôturant avant la décision des autorités européennes portant sur la liste des Etats qui, remplissant les conditions fixées par le Traité de Maastricht, seront admis au titre de membres de l'Union monétaire ? Cette décision interviendra normalement au cours du 1er semestre de 1998. 

La Commission est d'avis, au vu de l'ensemble de la politique poursuivie par le Gouvernement belge visant à respecter les critères de Maastricht, ainsi que de la décision du Conseil des Ministres du 2 août 1996 approuvant les lignes de force du schéma national de place, que les entreprises sont en droit d'estimer dès à présent, que l'adhésion de la Belgique est à ce point probable, que la constitution de provisions pour rencontrer les charges qui y sont associées est, aux conditions et selon les modalités précitées, justifiée au regard de la réglementation comptable. 

Traitement du passage à l'Euro dans les comptes consolidés 

Les problèmes spécifiques aux comptes consolidés feront l'objet d'un avis ultérieur. 

Publication des comptes 

La Centrale des bilans a suggéré que les bilans établis en euros soient, tant en ce qui concerne les grandes entreprises que les PME, déposés à la Centrale des Bilans en unités euros, sans décimales, et non, comme c'est le cas aujourd'hui pour les grandes entreprises, en milliers de francs belges. Il n'y a pas d'objection de principe à une telle modification. La question se pose toutefois de savoir si la lisibilité des comptes en sera favorisée. La Commission n'est, quant à elle, pas convaincue de l'opportunité de supprimer, en ce qui concerne les grandes entreprises, la présentation des comptes en milliers d'unités, même si la portée effective de l'arrondissement des chiffres au millier sera sensiblement accentuée du fait du passage à l'euro. A sa connaissance, un tel arrondissement des chiffres dans les comptes publiés est de pratique courante à l'étranger. Si une telle modification était décidée, elle devrait être traduite réglementairement. Le cas échéant, la question doit alors également être posée en ce qui concerne les comptes consolidés.

 

  • 1On ne traite pas ici des problèmes particuliers qui peuvent se poser pour le secteur des établissements de crédit et pour le secteur des entreprises d'assurances. 
  • 2Ce qui, il convient de le souligner, n'est pas le cas, dans l'hypothèse où des comptes seraient actuellement établis en écus. 
  • 3Avis 152/1 publié dans le Bulletin n° 20 de décembre 1987, section IX, litt. f, p. 48.
  • 4Avis 172/1 «Intégration des comptes d'une succursale étrangère», publié dans le Bulletin n° 35 d'octobre 1995.